Grossesse et perturbateurs endocriniens : où sont-ils ? comment les éviter ?
Les perturbateurs endocriniens, c'est quoi ?
Les perturbateurs endocriniens sont des substances qui… perturbent notre système endocrinien. Merci, Captain Obvious ! Plus concrètement : ils mènent nos récepteurs hormonaux par le bout du nez en se faisant passer pour nos hormones naturelles. De sacrés blagueurs ? Plutôt de dangereux faussaires. Ils utilisent leurs talents d’imitateurs pour brouiller, modifier, bloquer les actions normales de nos hormones. Et provoquer des réponses inappropriées de notre organisme, nocives pour notre santé. Développer trop précocement nos glandes mammaires et accroître notre risque de cancer du sein en imitant nos œstrogènes n’est assurément pas la blague de l’année.
D’où sortent ces usurpateurs ? Pour quelques uns, de la nature : les plantes dites phyto-œstrogènes comme le soja, la luzerne, la sauge (à consommer raisonnablement pendant la grossesse). Les plus nombreux et dangereux sont de création humaine : on les retrouve dans les produits manufacturés, pesticides, plastiques, médicaments et contraceptifs, rejets industriels… Certains sont devenus des stars – bisphénols, parabens, phtalates…-, mais il en existe plus d’un millier ! Eh oui, apprentis sorciers, nous avons fait les choses en grand. La plupart persistent des années dans l’environnement, passant sans problème de l’air vers les eaux, les sols puis vers notre alimentation, avant de passer de nos urines vers les eaux… Une économie circulaire pas très vertueuse ! Résultat : ils sont partout autour de nous. Souvent à faible dose, certes, mais vraiment partout. Et un peu + un peu chaque jour = beaucoup !
Beaucoup trop, même, à certaines périodes de notre vie, lorsque notre système hormonal est plus vulnérable : à la puberté, lors de la conception, pendant notre vie intra-utérine et nos 3 premières années.
Grossesse = principe de précaution x 1000
L'enjeu des premières semaines
La grossesse est une période cruciale car on sait aujourd’hui avec certitude que les perturbateurs endocriniens passent la barrière du placenta. On a retrouvé du triclosan et des parabens dans le méconium de nouveaux-nés. Oui, dès leur naissance.
Les premières semaines de grossesse et celles précédant la conception sont particulièrement critiques. Les perturbateurs endocriniens que nous ingérons augmentent le risque de fausse-couche et l’embryon est très vulnérable au cours de ce premier trimestre : ses organes sont en train de se mettre en place.
Les risques
Avec les perturbateurs œstrogéniques : retards de croissance, cancers, obésité, diabète, malformations génitales chez les garçons, puberté précoce et infertilité liée à des ovaires polykystiques ou à l’endométriose chez les filles… Les perturbateurs thyroïdiens expliqueraient l’explosion des dysfonctionnements du système nerveux central : problèmes de développement psycho-moteurs, troubles du comportement, hyperactivité, baisses de QI (nous vous conseillons à ce sujet le documentaire Demain, tous crétins?). Des effets irréversibles extrêmement préoccupants… pour ceux que nous connaissons.
Car nous n’avons aujourd’hui qu’un petit aperçu du désastre, alors que le signal d’alarme a été tiré dès les années 1960 par une grande dame trop souvent oubliée, pionnière de l’écologie. Rachel Carson, biologiste américaine, première à dénoncer les effets de pesticides sur la nature et notre santé et prôner une agriculture biologique le paiera de sa vie. Elle décèdera d’un cancer du sein lié aux pesticides qui seront interdits suite à ses travaux.
Une certitude : nous ne sommes pas au bout de nos découvertes. Notre système hormonal est complexe. Les perturbateurs endocriniens nombreux et leurs effets souvent différés. Nos pathologies adultes trouvent parfois leur origine dans notre vie fœtale ! Pire, ils peuvent se transmettre sur plusieurs générations comme l’illustre le tristement célèbre cas des filles Distilbène. Des filles, petites-filles et même arrière-petites filles des femmes ayant pris ce médicament pour éviter les fausses couches de 1955 à 1977 souffrent de malformations de l’appareil reproductif, d’infertilité et cancers du sein. Vertigineux.
Comment les éviter ?
Soyons clairs : aujourd’hui, se préserver à 100% des perturbateurs endocriniens est impossible.
Difficile d’arrêter de respirer, non ? Et puis certains avancent masqués, même dans les cosmétiques, malgré la liste INCI. Parfum, par exemple, est souvent un paravent -tout à fait légal- pour plusieurs perturbateurs endocriniens. Et qui sait quelle substance sera mise en cause demain ? Bisphénol S, phénoxyethanol : certaines solutions de secours se sont révélées pires que le perturbateur endocrinien qu’elles devaient nous permettre d’éviter.
Ça y est nous vous avons déprimé.es ? C’est le moment de dégainer LA bonne nouvelle : il est assez simple d’éviter un bon nombre de perturbateurs endocriniens.
L'alimentation
L’alimentation est notre principale source de contamination : résidus de pesticides dans les végétaux, métaux lourds, dioxines ou PCB dans les produits d’origine animale. Miam. Les bons réflexes ? Manger bio et éplucher fruits et légumes non bios, éviter les plats industriels, limiter les poissons gras pleins de métaux lourds. Ne ruinez pas ces efforts en utilisant des films ou contenants plastiques (surtout d’avant 2015 et/ou s’ils doivent être chauffés), du téflon plein de composants perfluorés, des conserves et canettes métalliques, bouteilles en plastiques. Privilégiez verre, inox ou céramique.
Les retardateurs de flamme
Autre calamité : les retardateurs de flamme qui sont… partout : vêtements et tissus synthétiques, mousses de matelas, canapés, mobilier, appareils électriques, jouets plastiques, peluches… Très volatiles, on les retrouve jusque dans les moutons de poussière. Privilégiez le made in UE aux normes plus protectrices, les matières naturelles. Et lavez systématiquement tissus et peluches après achat.
À cause d’eux, notamment, notre air intérieur est souvent plus pollué que l’extérieur. Aérez en grand au minimum 15 minutes par jour. Oui, même en hiver. De toute façon, enceinte on a toujours trop chaud ;). Côté ménage, faites soigneusement la poussière mais oubliez les détergents industriels et parfumés : on peut TOUT faire (dont des économies) avec du vinaigre blanc, du savon noir et du bicarbonate. Exit aussi parfums d’intérieur, bougies parfumées, encens.
La chambre de bébé
Vous voulez certainement préparer le futur nid de bébé ? Attention aux COV, Composés Organiques Volatiles : optez pour des peintures écologiques à l’eau, des meubles en bois massif ou d’occasion plutôt qu’en panneaux de fibres. Le mieux ? Restez donneuse d’ordre dans votre canapé et déléguez la réalisation des travaux, suffisamment en amont de la naissance (profitez, dans quelques mois ce sera fini!).
Cosmétiques
Bien sûr, cosmétiques et produits d’hygiène ne sont pas épargnés : plus de 40% contiendraient au moins un perturbateur endocrinien. Quasiment tous les produits conventionnels. Les pires ? La liste est longue : vernis, maquillage, démaquillants, soins du visage, déodorants, dentifrices, shampoings, teintures, parfums… Les composants à scruter ? Conservateurs et antibactériens, émollients : paraben (butylparaben, propylparaben), silicones (leurs noms se terminent en -xane, -ane, – conol, -cone), phtalates, phenoxyethanol, triclosan, alkylphénols, resorcinol, lilial ou BMHCA (ingrédients de parfum). Les sels d’aluminium des déodorants pourraient intégrer le club. Ajoutons les filtres anti-UV chimiques des crèmes solaires, hydratantes, du maquillage…
Le 100% naturel et bio est une bonne façon de vous en préserver, mais insuffisante car certains composants naturels ont une action œstrogénique : huiles essentielles (Sauge Sclarée, Niaouli, Patchouli, Cèdre de l’Atlas, Menthe Poivrée…), poudre de Damas, de Reetha, de Fénugrec. Bref, n’adoptez que les produits explicitement dépourvus de perturbateurs endocriniens, expliquant clairement qu’ils sont adaptés à la grossesse. Cela vous préservera en plus de nombreuses autres substances problématiques.
>>>> Pour creuser la question : Cosmétiques & grossesse : enceinte, comment prendre soin de moi sans risques ?
Les premiers cosmétiques certifiés sans perturbateurs endocriniens
Avec Moom nous vous avons fait une promesse : celle de garantir l’absence de perturbateurs endocriniens dans vos soins ! Nos cosmétiques sont les seuls produits sur le marché certifiés sans perturbateurs endocriniens grâce au test OEDT.
Pour les découvrir ↓
Pour aller plus loin
Ne vous contentez pas de croire fabricants et commerçants sur parole : doutez, décortiquez toutes les étiquettes, interrogez-les si des informations manquent.
Une source très précieuse : le projet Nesting de WECF, Women engage for a common future, réseau international d’organisations féminines et environnementales, avec ses guides très complets pour un environnement le plus sain possible pendant la grossesse et autour de bébé.
Enfin, pour protéger bébé, surveillez votre taux d’iode les semaines avant la conception et pendant la grossesse. Une carence entraîne un mauvais fonctionnement de la thyroïde, ce qui amplifie les effets des perturbateurs endocriniens. Systématiquement surveillé dans certains pays car essentiel au bon déroulement de la grossesse et au développement intellectuel du bébé, il ne l’est pas en France. Où pourtant 80% des femmes enceintes auraient un taux d’iode à 50% du niveau requis. Demandez à votre sage-femme ou médecin si une supplémentation est nécessaire.
On dit que les 1000 premiers jours d’un enfant, de la conception à ses 2 ans, sont déterminants pour construire toute sa santé future. Quelle pression ! Pendant 9 mois vous allez crouler sous les conseils voire les injonctions. Relativisez, sans pression ni culpabilité, et ne vous empêchez pas de vivre : non, vous ne pourrez pas échapper à tous les perturbateurs endocriniens. Pour autant, résignation interdite : vous informer pour agir là où c’est possible est déjà énorme. Cerise sur le gâteau, éviter les perturbateurs endocriniens vous fera adopter de nouvelles habitudes bénéfiques sur tellement d’autres plans : santé, nutrition, environnement… D’une pierre 4 coups !
Alerte sur les mélanges de perturbateurs endocriniens pendant la grossesse, INSERM, 2017
Crédit photo : Tatiana Syrikova
Mama Writer : Gaëlle Ruby
Gaëlle est une femme aux multiples pouvoirs : RH, rédactrice, Freelance et maman de 3 enfants. Elle porte toutes les casquettes à la perfection. Ayant vécu 3 grossesses, militante pour le droit des femmes et l’environnement, elle a créé en 2009 Ti-bahou : la boutique éthique des p’tits Loulous et leurs (futures) Mamans ! Les articles qu’elle nous écrit d’une plume énergisante permettent de redonner le pouvoir aux futures mamans. Elle nous donne toutes les ficelles pour prendre sa grossesse en main, découvrir notre potentiel et consommer moins mais mieux en connaissance de cause 😉 !