Accoucher avec ou sans péridurale ?
La péridurale, vous ne savez plus quoi en penser. Votre cœur balance entre « pourquoi souffrir quand on peut l’éviter ?» et la crainte de ne pas vivre pleinement votre accouchement. Autour de vous, certaines la refusent comme un défi, d’autres vous alertent sur ses inconvénients. L’important ? Faire un choix éclairé qui vous convienne. Allez, on vous aide.
La péridurale, késako ?
comment ça marche ?
Fin du XIXe siècle : un neurologiste américain constate l’insensibilisation de tout le corps en-dessous de la taille d’un patient après lui avoir injecté entre deux lombaires … de la cocaïne ! Pas d’inquiétude, les stups ne débarqueront pas à la maternité : de nombreux scientifiques se sont ensuite attelés à mettre au point notre péridurale actuelle, garantie cocaïne-free ;). Introduite dans les salles de naissance dès les années 1940, elle s’est imposée vers 1980 comme la norme de l’accouchement sans douleur. Dans les maternités françaises, en tout cas : en France, plus de 80% des accouchements se déroulent sous péridurale ! Soyez donc rassurée sur un point : cette procédure n’étant pas la dernière nouveauté en date, on dispose d’un bon recul à son sujet.
Concrètement, en salle de naissance, un médecin anesthésiste va piquer votre dos entre 2 vertèbres lombaires alors que vous êtes assise dos rond ou couchée sur le côté. L’objectif : introduire un fin cathéter et un mélange anesthésiant local / narcotique jusqu’à l’espace péridural qui entoure la moelle épinière. Le cathéter reste ensuite maintenu dans le dos par un gros pansement durant tout l’accouchement, afin de réinjecter du produit dès que nécessaire (de plus en plus souvent en autonomie : il vous suffit d’appuyer sur un bouton).
Quelques minutes plus tard, les douleurs du bas du corps – utérus et périnée notamment – semblent magiquement effacées, mais vous restez parfaitement réveillée. Les sensations ? Difficiles à décrire… Rien à voir en tout cas avec l’anesthésie chez le dentiste : la péridurale est une analgésie, elle n’agit que sur les les messages douloureux transmis au centre nerveux, pas les sensations. Bien réalisée, elle supprime la douleur des contractions, mais pas leur perception. Le rêve !
Péridurale pour toutes ?
A part quelques contre-indications, toute femme dont le début de travail est confirmé peut demander à en bénéficier. La condition d’une dilatation entre 3 et 6 cm ? Elle n’est pas impérative, seulement un idéal : le travail est suffisamment engagé pour ne plus trop risquer de ralentissement et il reste du temps pour que la péridurale fasse effet, surmonter d’éventuels effets indésirables (on va tout vous expliquer #teasing). Bref, la péridurale c’est si on veut, quand on veut (encore faut-il qu’un anesthésiste soit disponible…).
Pourtant, toutes les femmes ne souhaitent pas accoucher sous péridurale. Pourquoi ? Parfois par crainte : la sensation d’analgésie de la moitié du corps peut être angoissante, sa zone d’injection et l’aiguille impressionnantes (oui c’est stressant et désagréable, on n’irait pas se faire poser une aiguille pour le fun mais promis, la douleur est très brève). Certaines craignent effets secondaires et complications. Mais le plus souvent, le refus de la péridurale s’explique par le souhait d’un accouchement physiologique et l’envie de vivre pleinement ce moment. Alors, avec ou sans péridurale ?
Faut-il se méfier de la péridurale ?
Péridurale, mon Amour… quand tout va bien
La péridurale a de sérieux atouts. Déjà, elle se transforme hyper rapidement en anesthésie si des complications l’exigent, permettant de gagner des minutes parfois précieuses.
Surtout, atténuer la douleur n’est pas une simple question de confort : une douleur intense peut avoir d’importantes répercussions sur la maman et le bébé. Psychologiques : la sensation de ne pas assurer peut aller jusqu’à une véritable détresse. Physiologiques : tachycardie, hyperventilation limitant la respiration, hormones du stress qui montent en flèche entraînant une moindre alimentation du placenta et des contractions moins efficaces… C’est aussi garder ses forces pour pousser et s’occuper ensuite de son nouveau-né.
Quand tout se passe bien, la péridurale est assez géniale : on sent absolument tout sans avoir mal. L’envie de pousser au bon moment, bébé qui descend, sort de soi. Sans douleur ou presque ni sensation de paralysie.
Ensuite, elle se dissipe vite, on échappe à la sonde urinaire (mioum) pour vider la vessie (la péridurale empêche de contrôler les muscles de la vessie). Hop, on est sur pieds dès la remontée en chambre (attention, même si vous vous en sentez capable, ne vous levez pas la première fois sans personnel médical présent… Certaines ont essayé, elles n’ont pas été félicitées, ahem).
Mais vous pouvez aussi vous retrouver dans la situation totalement inverse… et impossible de savoir à l’avance à quoi s’attendre (seul point à peu près prévisible : l’anesthésiste vous reprochera de trop bouger et/ou de ne pas faire suffisamment le dos rond ^^).
Effets indésirables et complications ? Pas d’affolement !
L’analgésie péridurale est un geste médical extrêmement courant, parfaitement maîtrisé : le risque de complications existe, mais elles restent bénignes et temporaires. Pendant l’accouchement, une péridurale qui montre trop haut gêne la respiration. Trop forte, elle fait chuter la tension artérielle d’un coup, très bas. Même si les équipes réagissent vite et que tout revient très vite à la normale, c’est très angoissant, pour vous comme pour votre partenaire. Pour bébé, rassurez-vous, il ne court aucun danger : les bébés endormis par la péridurale sont des légendes urbaines. Cependant, son cœur peut ralentir un peu pendant quelques minutes : son rythme cardiaque est étroitement surveillé dès la pose de la péridurale.
Parfois, la péridurale ne soulage pas ou alors partiellement. Le produit est mal réparti ? C’est le bingo : on a la sensation d’être paralysée + la douleur de toutes les contractions. On retente, augmente les doses, mais pour certaines femmes le soulagement n’arrive jamais.
Après l’accouchement
, pour l’essentiel, ce sont de petits désagréments : une gêne de quelques jours au point de ponction, quelques sensations de lourdeur dans les jambes dues à de mauvaises postures (sous péridurale votre corps ne vous alerte pas si une position comprime vos nerfs : pour l’éviter, bougez toutes les 30 minutes). Plus rarement, une difficulté à uriner, des maux de tête en position debout si l’aiguille péridurale est allée trop loin, une infection du point de ponction. Les conséquences graves ? Chocs allergiques ou accidents cardiaques sont extrêmement rares, comme pour toute analgésie/anesthésie. Finalement, le plus gros enjeu autour de la péridurale est qu’elle peut compliquer et allonger la durée de l’accouchement. Et, dans tous les cas, déterminer le type d’accouchement que vous pourrez vivre.Péridurale ou douleur, il ne faut pas forcément choisir
Opter pour la péridurale c’est renoncer à certaines choses
Sans péridurale, vous ne vous garantissez pas à coup sûr l’accouchement de vos rêves. Mais en optant pour elle vous acceptez d’emblée de vous exposer à plus d’interventions médicales. Et à l’éventualité d’un accouchement totalement dirigé par le corps médical.
Une péridurale trop fortement dosée, c’est la sensation de ne plus avoir de prise sur son corps. II ne répond plus pour bouger un simple orteil ? Vous pouvez toujours attendre qu’il vous indique quand pousser ! Les poussées dirigées sont moins efficaces, l’expulsion souvent plus longue, plus sujette à des interventions invasives (forceps, ventouse…).
A partir du moment où vous donnez le Go ! pour la péridurale, vous risquez de ne plus quitter la position horizontale : le monitoring va surveiller en continu tension artérielle, rythmes cardiaques, intensité et fréquence des contractions. Vous pourrez bouger vos jambes un minimum, changer de position (si elle est bien dosée) mais a priori guère plus. Totalement en contradiction avec la physiologie de l’accouchement naturel ! Pour faciliter la progression du bébé dans le bassin, optimiser les contractions tout en minimisant la douleur et risques de complications et déchirure, rien ne vaut le mouvement ! Alors, faut-il souffrir pour accoucher physiologiquement ?
Gérer la douleur sans péridurale
En France, championne du monde des accouchements sous péridurale, le choix péridurale or not péridurale focalise le débat. Elle fait partie du package de base, la refuser c’est sortir de la norme. Ailleurs, les chiffres sont loin d’être aussi écrasants :
4 femmes britanniques sur 5 accouchent sans péridurale ! Parce qu’elles aiment souffrir ? Non ! Parce qu’il existe d’autres solutions pour soulager la douleur, trop peu utilisées en France.
Vous pouvez préparer un accouchement sans péridurale avec des méthodes et techniques spécifiques pour gérer et apprivoiser la douleur : notre article sur l’accouchement naturel vous présente les plus intéressantes (à venir bientôt).
Vous construisez un projet de naissance et souhaitez éviter la péridurale ? Demandez à rester libre de vos mouvements jusqu’au bout pour mieux gérer les contractions. Et à éviter ou retarder au maximum déclenchement et/ou perfusion d’ocytocine trop souvent systématique pour accélérer les choses : les contractions provoquées sont beaucoup plus douloureuses et épuisantes, résister à la péridurale peut vraiment devenir difficile.
Enfin, d’autres solutions médicales existent. Elles sont rarement proposées spontanément et leur disponibilité varie d’une maternité à une autre, mais interrogez votre médecin ou sage-femme :
- l’analgésie ambulatoire ou péridurale microdoséeefface le principal inconvénient de la péridurale en permettant de rester totalement libre de ses mouvements jusqu’au bout.
- le protoxyde d’azote (le fameux gaz hilarant) est courant au Royaume-Uni : inhalé avec de l’oxygène lorsque la contraction arrive (oui, on la sent bien approcher !), il atténue la douleur… avec une sensation euphorique en prime (franchement, ces contractions de toutes mes entrailles, quelle rigolade !). Il existe quelques contre-indications médicales et des effets secondaires temporaires (étourdissement, nausée).
- l’acupuncture qui soulage les femmes pendant l’accouchement en Chine a été adoptée par certaines maternités française en salle de travail, avec des sage-femme diplômées. Mais aussi la sophrologie, l’hypnose, les massages…
Alors, accoucher avec ou sans péridurale ? Quel est le meilleur choix ?
Aucun dans l’absolu. Accoucher sans n’est pas la garantie de vivre une expérience incroyable et transcendante : si la douleur submerge tout, on peut totalement passer à côté. Mais la refuser n’implique pas non plus d’accoucher sans aucune aide anti-douleur.
Accoucher sous péridurale n’est pas forcément s’en remettre totalement au corps médical : sous analgésie bien dosée, préparée et accompagnée, on peut aussi vivre pleinement son accouchement.
Bref, c’est un choix intime : à chacune d’entre nous de composer avec nos limites, notre histoire, ce que l’on sait, veut, peut… Certaines femmes parlent de fierté après avoir mis leur enfant au monde sans péridurale, s’en sentent plus fortes, plus légitimes. Mais il y a autant de façon de devenir mère et de donner la vie que de femmes !
Et les circonstances nous échappent parfois : vous la souhaitez ardemment ? Préparez-vous à l’éventualité de ne pas pouvoir en bénéficier. Vous voulez absolument vous passer de la péridurale ? Vous mentaliser sur « non, non, non, je ne la veux pas » peut vous aider à tenir, mais épuisée, physiquement et psychiquement, après des heures de travail, la péridurale pourra paradoxalement vous aider à être plus présente. Dans tous les cas, ne zappez ni le RV anesthésiste de fin de grossesse obligatoire ni l’éventuelle réunion d’information sur le sujet.
Pour aller plus loin
- l’association professionnelle du Caro, Club Anesthésie-Réanimation en Obstétriquesur le site Preanesthesie.fr : avec notamment une brochure Analgésie Anesthésie Réanimation au cours de la grossesse et de l’accouchement – Toutes les questions que vous vous posez.
- Elise Aimé. Réflexion sur la mobilité des parturientes qui bénéficient d’une analgésie péridurale. Médecine humaine et pathologie. 2014. ⟨hal-01844729⟩
- Aurélie Surmely. Accoucher sans péridurale, pour un accouchement naturel en pleine conscience. Editions Larousse
- Madeleine Akrich. La péridurale, un choix douloureux. Cahiers du Genre, L’harmattan, 1999
- La plus belle maman, épisode 10 : L’accouchement sans péridurale d’Aurélie
- Un temps pour Naître Episode 14 : Avec ou sans péridurale ?
- Podcast des Maternelles, saison 1, épisode 1 : Votre accouchement, avec ou sans péridurale ?
- Les Louves : J’ai décidé d’accoucher sans péridurale
- Oummi Materne, le blog des mamans : Témoignage, mon accouchement sans péridurale
- Dans ma tribu : Mes deux accouchements sans péridurale : le bilan
- Un Temps pour Naître : Comment rester actrice de mon accouchement sous péridurale
Mama Writer : Gaëlle Ruby
Gaëlle est une femme aux multiples pouvoirs : RH, rédactrice, Freelance et maman de 3 enfants. Elle porte toutes les casquettes à la perfection. Ayant vécu 3 grossesses, militante pour le droit des femmes et l’environnement, elle a créé en 2009 Ti-bahou : la boutique éthique des p’tits Loulous et leurs (futures) Mamans ! Les articles qu’elle nous écrit d’une plume énergisante permettent de redonner le pouvoir aux futures mamans. Elle nous donne toutes les ficelles pour prendre sa grossesse en main, découvrir notre potentiel et consommer moins mais mieux en connaissance de cause 😉 !